La paix ne se décrète pas.
Elle est à construire fraternellement, du local au global.

La guerre tue à Gaza et en Ukraine ; la menace de l’arme nucléaire pèse sur la planète ; l’horloge de l’apocalypse est réglée à minuit moins 90 secondes ; des conflits meurtriers se déroulent au Congo, Burkina Faso, Somalie, Soudan, Yémen...Partout, les civils sont les premières victimes des combats ; en Haïti, la police est dépassée par les gangs qui tuent et violent ; ici, dans un contexte de crise économique, sociale, politique, on s’émeut de la progression des actes de violence et la logique du bouc émissaire - l’étranger, le « migrant » - envahit l’espace public.

Et pourtant, l’aspiration à vivre en paix est une donnée universelle. Il nous faut interroger cette violence perpétrée sur les cinq continents et qui s’infiltre partout dans notre société, jusque dans les familles, les milieux de travail, le sport, l’école, nos quartiers. Violences physiques, verbales, psychologiques, sexistes, racistes, sexuelles, symboliques...elles nécessitent des actions préventives trop négligées au profit de la répression. Nous croyons en la primauté de l’éducation pour apprendre les mots à mettre sur les maux, pour promouvoir l’égalité de genre, changer les normes culturelles qui favorisent les postures de domination, prendre en compte les discriminations multiples qui ajoutent de la violence aux violences ...La coopération entre les parents, l’école et les associations d’éducation populaire se révèle efficace pour peu qu’on lui donne de vrais moyens.

Oui la paix est une aspiration universelle. Alors que se préparent les fêtes de fin d’année, il n’est pas inutile de rappeler que Noël – que l’on soit croyant ou athée, – c’est d’abord une fête de l’humilité, de la fragilité et de la paix. Lors du nouvel an où l’on échange des vœux, souhaitons-nous d’oser rompre avec la facilité de la pensée « réaliste » qui bride l’imagination et empêche l’élan utopique vers un projet fou, celui de la juriste Monique Chemilier-Gendreau : « inclure l’ensemble des sociétés humaines dans un projet commun universel, le faire sur un pied d’égalité de tous les groupes qui composent l’humanité ». 

Nous qui vivons à Brest, face à l’océan, gardons en mémoire le message en morse transmis en 1858 par le premier câble transatlantique qui réunit l’Europe au continent américain : « Paix et bonne volonté aux hommes sur la terre ». Quelle inspiration prophétique, contre toutes les réalités, contre toutes les volontés de puissance !

Pour la nouvelle année qui approche, que peut offrir l’Université Européenne de la Paix à ses lecteurs, sinon de la résistance contre la force des habitudes et les mots sans concession de Martin Luther King : « Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots ».

Anne-Marie Kervern, l’Orange Bleue, n° 136