Le Haut-Karabagh est une région à population arménienne de 4.400 km2, plus petite que le Finistère. Elle est au cœur d’un conflit qui oppose l’Azerbaïdjan à l’Arménie depuis près de 30 ans et qui a fait de nombreux morts, 30.000 entre 1988 et 1994 et près de 5.000 dans les derniers 44 jours.

Les causes

La principale cause du conflit est politico-militaire. L’Azerbaïdjan estime devoir récupérer une région qui lui a été arrachée par la force en 1991 par les « séparatistes » du Haut-Karabagh soutenus par l’armée arménienne. Mais, de son côté, l’Arménie soutient que c’est Staline qui l’a amputée de cette région en 1923. La signature d’un cessez-le-feu en 1994, sous la pression des armes, n’a pas résolu le conflit entre Bakou et Erevan.

De nombreuses autres causes, historiques, ethniques, religieuses, économiques, stratégies internationales viennent se greffer sur ce contexte instable.

Imbroglio juridique et politique international

En 1994, le cessez-le-feu permanent imposé par la force à l’Azerbaïdjan est garanti par le « Groupe de Minsk » (Moscou, Washington, Paris). Mais les séparatistes ont fait du Haut-Karabagh une république indépendante autoproclamée : « l’Artsakh », jamais reconnue par la communauté internationale.

Le conflit actuel est très fortement soutenu par la Turquie d’Erdogan, qui non seulement fournit des armes à l’Azerbaïdjan, dont des armes « interdites » (bombes au phosphore, armes à sous-munitions particulièrement meurtrières pour les populations civiles) mais y a aussi favorisé l’envoi de plusieurs centaines de combattants plus ou moins radicalisés venant de Syrie et de Libye. De son côté, Israël a livré à l’Azerbaïdjan des armes « modernes » (drones et missiles) qui viennent de se montrer efficaces contre l’armée arménienne. Israël et les Etats-Unis se servent de l’Azerbaïdjan comme tête de pont pour sa proximité géographique avec le « Grand Satan » iranien.

La France soutient officiellement l’Arménie mais continue de livrer de l’armement à l’Azerbaïdjan…

La Russie de Poutine vient de siffler la fin de la récréation en ménageant à la fois l’Azerbaïdjan et l’Arménie dont elle est très proche historiquement et économiquement et ne souhaite pas les voir tomber dans le giron de l’OTAN.

Quel avenir pour le Haut-Karabagh ?

Le statu quo actuel est difficilement tenable à long terme : frontières improbables avec de nombreuses enclaves imbriquées dans les deux pays et deux couloirs protégés par l’armée russe. L’Arménie a été humiliée par sa récente défaite et l’Azerbaïdjan rêve de conquérir toute la partie sud de l’Arménie afin d’intégrer son enclave occidentale isolée et y assurer une zone sécurisée pour l’implantation d’oléoducs reliant ses puits de pétrole à la Turquie et à la Méditerranée.

De son côté Erdogan caresse l’espoir de devenir le grand défenseur des croyants sunnites, d’où sa forte implication dans le conflit actuel et bien que l’Azerbaïdjan soit majoritairement chiite.

Tout est réuni pour que cette région du Caucase soit à nouveau le théâtre de nouveaux affrontements sanglants.

Joël Rolet, 7 décembre 2020
L’Orange Bleue, n° 122