Un regard pacifiste sur les noms de rues

Brest dispose d’une rue de la Paix largement moins huppée que l’avenue de la Paix aussi célèbre dans notre capitale qu’au Monopoly. Le prix au m2 habitable est certainement bien plus abordable dans le quartier du Valy Hir. 
Au-delà d’avoir excité notre curiosité, il n’en demeure pas moins que la ville de Brest a bien une Place de la Liberté, depuis peu une de la Fraternité, mais point de Place de la Paix… Pourtant Paix est au féminin ce qui ne gâche rien dans le rééquilibrage des noms de rues de la ville à ce jour bien ancré sur le masculin. Espérons que notre curiosité poussera les décideurs de notre métropole à engager une démarche pour qu’un lieu bien plus exposé prenne un jour la dénomination de Place de la Paix.

Dans l’immédiat, il serait urgent de changer le nom de quelques rues qui mettent en valeur des individus au passé peu glorieux. À proximité de la cité Kérigonan, des habitant.e.s et citoyen.n.e.s ont proposé de remplacer le nom de la rue Bugeaud par rue Général de Bollardière (l’homme qui a dit Non à la torture en Algérie) . Ils ont osé apposer de vraies fausses plaques de rue pour faire disparaître le nom d’un maréchal sanguinaire. La presse algérienne dit de Bugeaud : « Le terme « enfumades » est systématiquement associé au nom du Maréchal Bugeaud. Ce fut, en fait, sa doctrine. La politique de la terre brûlée qu’il a décidée et mise en œuvre a eu, aux dires des historiens français, « des effets dévastateurs sur les équilibres socioéconomiques et alimentaires du pays ». « Quand les informations sur les « enfumades » des grottes du Dahra parviennent à Paris, c’est l’indignation dans certains milieux anticolonialistes, qui font une interpellation au maréchal. Celui-ci en assume la responsabilité et répond : « Et moi, je considère que le respect des règles humanitaires fera que la guerre en Afrique risque de se prolonger indéfiniment. » Sur le terrain également, les méthodes de « pacification » préconisées par Bugeaud et appliquées avec zèle par certains de ses subordonnés ne font toutefois pas l’unanimité. Mais Bugeaud qui, en sa qualité de gouverneur général de l’Algérie, était à la tête du corps expéditionnaire justifia toutes les exactions commises par les troupes françaises. Pour lui, « il n’y a pas d’autre moyen d’atteindre et de soumettre ce peuple extraordinaire ». » Avec un tel palmarès macabre qui déshonore la France, il est parfaitement compréhensible que des Français veuillent déboulonner le Maréchal Bugeaud, symbole de la barbarie coloniale en Algérie. » Source : Fatiha Mez dans Algérie Patriotique 8/2017.

L’association à l’origine de la demande du changement de nom à la rue Bugeaud existe toujours et certains verraient d’un bon œil que les changements de dénomination soient faits rapidement. Nous précisons les changements, car l’école maternelle Bugeaud serait aussi à prendre en compte. Pour un juste retour vis-à-vis de l’Algérie, nous aurions pour suggestion qu’elle prenne le nom de Kateb Yacine, poête algérien ou de René Vautier, cinéaste militant, avec un juste retour des choses.

Claude Arnal, l’Orange Bleue, numéro 113

Kérigonan, années 30