Contribuer à créer à Brest une économie de paix en encourageant la réorientation progressive des potentiels humains et technologiques des industries d’armement vers des productions pacifiques utiles à la société est l’un des objectifs fondateurs de l’Université Européenne de la Paix (UEP). A cet effet, le 16 mars dernier, l’UEP, une fois encore, était à l’initiative d’un débat public auquel ont participé une cinquantaine de brestois-es qui, pendant deux heures, ont débattu de l’avenir industriel de notre cité.

L’avenir de la navale est préoccupant. Avec la fin programmée des grands carénages des SNLE pour fin 2017, sans qu’aucun nouveau chantier ne soit à ce jour annoncé pour assurer le plan de charge de l’arsenal, une fois encore l’avenir du premier moteur industriel brestois est en suspens. D’autant qu’avec les retards qui ne cessent de s’accumuler dans la réalisation des travaux du polder, les espoirs que l’on fondait sur les énergies marines renouvelables (EMR) pour assurer une relance de l’activité s’éloignent.

Face à ce constat, le but poursuivi par l’UEP à l’initiative de ce débat est de contribuer à une prise de conscience des incertitudes qui pèsent sur le devenir de l’industrie navale locale et ceci dans l’espoir de remobiliser les forces locales pour éviter que la Navale ne coule définitivement.

Ce préambule posé, Thierry Sauvin, universitaire brestois auteur du livre « Entreprises et territoires » introduira le débat. Du court résumé de ses recherches deux points essentiels ressortiront. 1° Sans base industrielle solide, l’économie de service est une illusion ; c’est de l’industrie, là où se réalisent les productions matérielles, que viennent innovations et gains de productivité qui font le dynamisme des territoires. 2° Le socle industriel historique d’un territoire (l’industrie navale pour Brest) est pour son développement futur un capital inestimable (le potentiel de compétences accumulées) mais aussi parfois un frein (les a priori culturels, les routines qui empêchent parfois de prendre les bonnes options).

Les échanges qui suivront cette introduction porteront principalement sur les points suivants.

Sans revenir au passé, de réelles perspectives de développement industriel existent.

Inutile d’espérer construire à nouveau des bateaux gris à l’arsenal. La nostalgie n’est plus de mise, il faut aller de l’avant. L’avenir de la navale aujourd’hui c’est bien sûr d’abord les EMR. Les compétences requises, les équipements existants ou en construction, sa position géographique , tout justifie que Brest tienne sa place sur ce créneau d’avenir. Construction d’éoliennes flottantes, d’hydroliennes, mais aussi ensuite opérations de maintenance et pourquoi pas construction de bateaux de servitudes ? Les besoins seront multiples. Encore faut-il une réelle volonté d’engager cette bifurcation industrielle. Et là, force est de constater que l’on a pris un retard de 5 ans au moins sur Saint-Nazaire et Cherbourg.

Il y a aussi la déconstruction des vieux navires soutenue selon une étude récente par une majorité de brestois-es mais toujours snobée par les principaux décideurs locaux. Et puis ne sommes-nous pas en matière d’espaces marins la deuxième puissance maritime au monde ? Cela crée des opportunités et notamment pour Brest en matière de sécurité maritime. Enfin il y a le technopole, pépinière de start ups dont il faudrait favoriser le passage sur place au stade industriel.

Ce qui manque c’est la volonté politique
Les décideurs locaux ne semblent guère mobilisés sur ce dossier. Ainsi on construit à grands frais un polder pour accueillir les EMR, sans qu’à ce jour aucun industriel se soit engagé à venir. Qui s’en inquiète ? Quelles démarches les collectivités engagées dans son financement ont-elles entreprises pour redresser la barre ? Comment interpréter l’absence à notre débat des principales personnalités politiques et économiques locales que nous avons invitées et qui pour la plupart se sont faites poliment excuser ? En tout cas ce n’est pas la meilleure façon de gagner le soutien pourtant nécessaire de la population pour arracher les contrats qui assureront la pérennisation de l’activité industrielle à Brest. Ce déficit de volonté politique n’est-il pas le produit d’une histoire locale qui nous a habitués à attendre tout « d’en haut », de l’Etat distributeur des commandes militaires, et peut être aussi aujourd’hui de la Région nouveau propriétaire du port et des installations du polder ?

Conclusion : l’avenir industriel de Brest est l’affaire de tous.
Brest doit redevenir dynamique sur le plan industriel. Il y aura de l’espoir pour l’avenir si tou-te-s les brestois-es s’emparent de la question. Ensemble nous trouverons les bonnes solutions. Le débat entamé aujourd’hui doit être poursuivi dans les mois à venir. Il contribue à la remobilisation nécessaire de toutes les forces locales pour la défense de notre industrie navale. Thierry Sauvin propose à cet effet de recréer à l’université comme du temps de Brest Debout il y a vingt ans, un atelier de recherche citoyen ouvert à tous sur le thème du développement industriel de Brest et invite les participants au débat à s’y inscrire dès à présent.

Roland de PENANROS