Voilà maintenant plus d’un an, anticipant la signature du TIAN (Traité d’Interdiction des Armes Nucléaires), nous organisions un premier débat public sur la reconversion inéluctable à terme de l’île longue et l’élaboration d’un nouveau projet de développement de Brest et de sa rade, une fois celle-ci libérée de l’emprise nucléaire. D’autres débats devaient suivre que nous n’avons malheureusement pu organiser compte tenu des contraintes sanitaires...

Aussi sans attendre la possibilité à nouveau d’en débattre de vive voix, nous vous présentons ci-dessous un projet de reconversion de l’île longue, proposé par l’un des participants au débat de l’an passé.

Faire de l’Ile Longue une centrale de production d’hydrogène

Aveuglé par une occupation militaire aussi multi séculaire qu’anesthésiante, on en oublie une fonction essentielle de la rade, localisée en son goulet : celle d’une centrale d’énergie.

Par le phénomène naturel des marées, ce sont, quatre fois par jour, 700 millions de m3 d’eau qui transitent dans le goulet, sous forme de courants marins à même de produire de l’énergie électrique.

Le Goulet de la Rade est une centrale de production d’énergie électrique EMR (Energie Marine Renouvelable), disponible et en attente d’exploitation.

A la sortie du Goulet de la Rade, le courant est maximal au niveau de la Cormorandière, que ce soit au flot ou au jusant - marée descendante -, le second étant plus puissant que le premier ; il peut atteindre jusqu’à près de 7 nœuds en grandes vives eaux à mi-marée, soit 3,6 m/s.

Ce courant marin peut donc être utilisé pour produire du courant électrique grâce à des hydroliennes.

Et cette EMR peut et doit constituer, dans un avenir proche, la matière d’entrée de l’après nucléaire de la base de l’Ile Longue, située à un jet de pierre du Goulet de la Rade :

faire de l’Ile Longue une centrale de production d’hydrogène (H2).

Pour mémoire, l’hydrogène est un moyen primaire de stocker l’énergie secondaire qu’est l’électricité, avant lui-même de servir à alimenter des piles pour à nouveau produire de l’électricité.

L’enjeu majeur, pour le devenir de la planète, de la production d’hydrogène par électrolyse est incarné par l’origine de cette électricité :

• soit poursuivre avec une électricité d’origine carbonée ou nucléaire, c’est-à-dire dans les deux cas non renouvelable,

• soit réellement enclencher la production industrielle d’électricité d’origine renouvelable.

Avec le couple Goulet de la Rade - Ile Longue, c’est le jackpot d’exception pour la Bretagne :

• les hydroliennes du Goulet de la Rade produisent une électricité d’origine renouvelable, prédictive et à très forte densité massique, sans égal face aux lois de la physique,

• cette électricité est acheminée par câbles sous-marins, à proximité, donc avec un minimum d’élévation de tension et donc avec un rendement maximal, dans les souterrains de l’Ile Longue, où, par électrolyse, l’hydrogène est produit puis stocké avant d’être distribué pour desservir des stations dédiées à la mobilité (bateaux, trains de fret et de passagers, cars, bus, vélos, camions, engins agricoles, de terrassement, voitures, …).

Corollaire non négligeable, le Goulet de la Rade devient ce qu’il aurait dû être d’emblée, et notamment il y a déjà quarante ans lors de l’historique refus breton d’une centrale nucléaire :

une base d’essai EMR permettant un retour vers plus d’honnêteté intellectuelle vis-à-vis des industriels en charge du développement de ces nouvelles solutions ; en effet, dans une phase de développement technologique, avec la nécessité d’essais grandeur nature pour un prototype, afin de minimiser les coûts logistiques de mise en œuvre, on n’envoie pas les développeurs dans des courants parmi les plus puissants de la planète, à l’île de Brehat / Enez Vriad ou pire, entre Ouessant et Molene / etre Eussa ha Moal Enez, là où le courant s’appelle Fromm Veur, ce qui signifie Grand Courant.

On confie plutôt à ces industriels un site facile d’accès et d’emploi, protégé, surtout lorsqu’il leur tend les bras : le Goulet de la Rade, entre Leon ha Kerne.

Padrig Karioù, l’Orange Bleue, n° 124