"Ce sont les bombes larguées sur Hiroshima et Nagasaki qui ont permis d’arrêter la guerre en 1945"


Le 6 août 1945, une bombe de 16 kilotonnes est lâchée sur Hiroshima et tue sur le coup 80 000 personnes.

Le 9 août 1945, une bombe de 20 kilotonnes est lâchée sur Nagasaki et tue immédiatement 70 000 personnes.


Que se passe-t-il alors à la tête de l’empire Japonais après ces deux bombardements ?

Quand on voit la vitesse à laquelle, dans nos pays, les autorités réagissent aux attentats ou à une catastrophe naturelle par des réunions ministérielles convoquées dans les heures qui suivent l’événement, par comparaison, les dirigeants Japonais prennent leur temps. Le 8 août, soit deux jours après l’explosion de la première bombe atomique, le Ministre des Affaires Étrangères Togo Shigenori demande la réunion du Conseil Suprême*. Le Premier Ministre constate que les membres du Conseil ne sont pas disponibles et il n’y aura pas de réunion le 8 août. Autrement dit il n’y a aucune urgence…

Le Conseil Suprême se réunit enfin le 9 août, très tôt dans la matinée, pour parler de la reddition. Et ce n’est qu’en début d’après-midi qu’il sera informé du bombardement de Nagasaki qui a eu lieu à 10h58.

Ce n’est donc pas la destruction de Nagasaki, ni celle d’Hiroshima trois jours plus tôt, qui expliquent que le Conseil Suprême envisage la reddition.

Certes les Japonais ont bien pris conscience qu’ils avaient affaire à une arme nouvelle, mais les destructions qu’elle avait provoquées n’étaient pas plus importantes à leurs yeux que celles qu’ils vivaient depuis plusieurs mois.

Depuis le début de l’année 1945, les États-Unis se livraient à une des plus effroyables campagnes de destruction de villes de l’histoire mondiale. Ce massacre de civils s’appelle un crime de guerre, un crime contre l’humanité.

Soixante-six villes du Japon (68 avec Hiroshima et Nagasaki) ont été bombardées et détruites de 50% à quasiment 100% pour certaines d’entre elles, par les avions américains.

Mais alors pourquoi le Conseil Suprême s’est-il empressé de se réunir le 9 août alors qu’il ne le pouvait pas la veille ?

Les Japonais se rendaient compte qu’ils avaient perdu la guerre : la marine avait subi de lourdes défaites, leur aviation était incapable d’arrêter les raids étasuniens et la famine menaçait. C’était déjà suffisant pour arrêter la guerre. Mais c’est l’entrée en guerre de l’URSS contre le Japon le 8 août qui a précipité la reddition car c’est seulement 6 heures après la déclaration de guerre de l’URSS que le Conseil Suprême se réunissait le 9 août 1945 pour demander la reddition sans conditions. La loi martiale a été instaurée immédiatement.

Jusqu’au 8 août 1945 l’URSS était neutre dans la guerre avec le Japon. Se battre contre les États-Unis c’était déjà mal parti, mais s’il fallait y ajouter l’URSS c’était impossible pour le Japon.

Voici ce que déclarait le général Eisenhower, alors Commandant en chef des forces alliées en Europe qui s’opposa à l’utilisation de la bombe lors d’une réunion en juillet 1945 avec le Secrétaire à la guerre, Henry Stimson : "Je lui ai dit que j’étais contre [l’utilisation de la bombe atomique au Japon] pour deux raisons. D’abord, les Japonais étaient prêts à se rendre et il n’était pas nécessaire de les frapper avec cette chose terrible. En second lieu, je détestais voir notre pays être le premier à utiliser une telle arme."

Eisenhower deviendra président des États-Unis de 1953 à 1961.

Ce ne sont donc pas les 2 bombes atomiques utilisées au Japon qui ont fait gagner la guerre. Nous verrons dans un prochain article ce que cache ce mythe.

* Le Conseil Suprême était un groupe de 6 membres importants du gouvernement japonais (4 militaires et deux civils : le ministre de l’Armée, le ministre de la marine, le chef d’état-major des armées, le chef d’état-major de la marine, le ministre des Affaires Étrangères et le Premier Ministre) qui dans les faits a dirigé le pays en 1945.

Fanch Hénaff, Orange Bleue, numéro 111